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Mes réactions à l'actualité politique intérieure et internationale, sociétale, sociale .... .... Avec légèreté, chaque fois que je le peux ! Je fais mienne la formule de Philippe Meyer (Mammifère omnivore) "Nous vivons une époque moderne !"

Le prochain retour d'Evo.

    Le nouveau président bolivien.

Il avait dû fuir la Bolivie en 2019 après le mouvement qui avait suivi l'élection présidentielle du mois d'Octobre que le président sortant, Evo Morales, prétendait avoir remportée.

Un départ qui fleurait bon le coup d'Etat. Après la proclamation des résultats qui donnaient Evo Morales vainqueur au premier tour, son élection avait été contestée, provoquant des affrontements violents qui avaient entraîné sa démission et son départ au Mexique avant de trouver refuge en Argentine.

En fait, celui qui fut porté à la présidence de la Bolivie le 22 janvier 2006 n'aurait pu, selon la Constitution, se représenter lors du scrutin d'octobre 2019 pour briguer un quatrième mandat. Qu'à cela ne tienne, le président bolivien avait organisé un referendum pour modifier la Constitution du pays et pouvoir ainsi présenter sa candidature.

Mal lui en prit puisque celui qui depuis 2006 avait remporté tous les scrutins, n'obtint pas l'adhésion des boliviens à son projet. Une décision du Tribunal Constitutionnel, passant outre le résultat du referendum, lui permit de se présenter.

Lors du premier tour, durant le dépouillement, une interruption de plus de 20 heures survint, à l'issue de laquelle Evo Morales fut déclaré vainqueur de la présidentielle dès le premier tour.

Le résultat de l'élection fut contesté notamment par la droite et l'extrême droite qui reçurent le soutien des militaires. Ces derniers avaient occupé longtemps le pouvoir dans ce pays d'Amérique Latine où la grande pauvreté constitue un mal endémique. Il en fut notamment ainsi de 1971 à 1978 période qui a vu le dictateur Hugo Banzer occuper le poste de président alors que son gouvernement participait à l'opération Condor.

De violents affrontements eurent lieu, les partisans d'Evo Morales, particulièrement bien organisés notamment dans le fief d'El Alto, cette ville qui domine La Paz à plus de 4000 mètres d'altitude, n'entendaient pas être dépossédés de la victoire de leur candidat. De l'autre coté, droite et extrême droite, pensaient pouvoir renouveler le hold-up opéré peu avant par Bolsonaro au Brésil, après qu'il ait fait incarcérer son rival le favori des sondages, Lula.

C'est dans ces conditions qu'Evo Morales, issu d'une famille modeste de paysans amérindiens, qui avait accompli d'importantes réformes ayant sensiblement amélioré la situation matérielle des personnes frappées par la grande pauvreté, décida d'éviter à son peuple un bain de sang. Il démissionna de sa fonction de président et quitta le pays pour échapper à une arrestation.

Le parti qui l'avait porté au pouvoir, le M.A.S. (mouvement vers le socialisme), n'en continua pas moins, dans des conditions rendues plus difficiles, son action en faveur des plus déshérités et tout naturellement présenta son candidat à la présidence de la République en la personne de Luis Arce qui fut ministre de l'économie de l'ancien président.

Postérieurement à la démission d'Evo Morales, c'est la très conservatrice Jeanine Aňez qui assura pendant onze mois l'intérim de la présidence. Un an après, le bilan présenté est catastrophique. La Bolivie est le troisième pays au monde derrière le Pérou et la Belgique en nombre de morts par millions d'habitants dus à la pandémie du Covid 19. En outre, cette crise sanitaire n'a fait qu'aggraver celle qui désormais l'affecte sur le plan économique et social.

Il n'en a pas toujours été ainsi puisque ce pays, l'un des plus pauvres d'Amérique du sud, a connu après l'accession d'Evo Morales à la présidence de la République, une croissance importante qui a permis de faire chuter l'extrême pauvreté. La réussite de Luis Arce, actuellement âgé de 57 ans, et qui a occupé de 2006 à novembre 2019 le poste de ministre de l'économie, lui a valu d'être désigné comme « l'architecte du miracle économique ».

Pendant cette période, le Produit Intérieur Brut est passé de 9 à 40 milliards de dollars alors que le PIB par habitant était multiplié par trois. La pauvreté diminuait elle de 60 à 37 %.

Élu le 18 octobre avec 53 % des voix dès le premier tour, le nouveau président partisan d'un socialisme modéré, va devoir faire face à cette crise sanitaire, économique et sociale. Son principal atout sera le large soutien populaire dont il bénéficie dans la population.

Reste à savoir ce que sera l'attitude de la droite et de l'extrême droite. La présidente par interim a reconnu la victoire du candidat du M.A.S. et félicité le gagnant. De son coté le candidat de droite Carlos Mesa crédité de 30 % des voix, a reconnu la large victoire de son adversaire.

Le Secrétaire Général de l'ONU Antonio Guterres a salué des « élections pacifiques » et appelé les responsables politiques boliviens « à la réconciliation nationale ».

Celui qui va accéder à la présidence a déclaré dimanche soir de son QG : « Nous avons récupéré la démocratie et surtout nous avons récupéré l'espérance ». Il a assuré : « Nous allons gouverner pour tous les boliviens. Nous allons construire un gouvernement d'union nationale ».

Il lui appartiendra notamment de renouer les liens distendus depuis les protestations d'il y a un an, avec la police, les forces militaires ainsi qu'avec le secteur économique du pays.

Reste une inconnue, l'attitude de l'extrême droite représentée dans cette élection par Luis Fernando Camacho qui a réuni 14 % des suffrages. Son candidat avait mené en 2019 le mouvement de protestation et de violences contre Evo Morales accusé de fraude. Durant la campagne électorale Camacho déclarait : « Arce n'est pas un candidat, c'est la marionnette du dictateur Evo Morales ».

Il est évident que le résultat obtenu par l'ancien ministre de l'économie qui ne jouissait pas jusqu'à présent du charisme de son mentor, peut servir à valider a posteriori le résultat que revendiquait il y a un an Evo Morales. Et si la fraude qui lui était reprochée n'avait existé que dans la tête de ses adversaires ?

D'Argentine, Evo, comme les boliviens l'appellent, s'est réjoui de la large victoire de Luis Arce et a déclaré que « tôt ou tard », il serait de retour en Bolivie. Pour jouer quel rôle ?

Auprès d'une large couche de la population et notamment de ceux qu'il a sortis de la grande pauvreté, l'ancien président bénéficie d'un prestige intact. Il serait surprenant qu'il ne souhaite pas jouer un rôle central dans la nouvelle administration qui sera mise en place. Le nouveau président a toutefois tenu à préciser : « Evo Morales ne préside plus la Bolivie, celui qui va gouverner, c'est moi ». Pour lever toute ambiguïté...

Ce résultat intervient peu après l'élection de deux présidents de gauche sur le continent sud-américain. En 2018 Andrés Obrador accédait à la tête du Mexique. Depuis 2019, Alberto Fernandez assure la présidence de l'Argentine.

Avec Bolsonaro à sa tête, le Brésil qui connait une catastrophe tant économique que sanitaire, inquiète fortement. La destruction de la forêt amazonienne s'est accélérée sous son mandat et compromet les équilibres écologiques au niveau planétaire.

Il en est de même du Vénézuela où la crise politique n'a toujours pas trouvé un débouché permettant le retour des réfugiés et le redressement économique d'un pays riche en pétrole et qui pourtant, voit la famine s'accroître dans une population amenée à s'exiler.

Ainsi va l'Amérique latine longtemps secouée par des coups d'Etat ayant débouché sur des dictatures militaires et qui aujourd'hui, peine à retrouver une stabilité institutionnelle pourtant indispensable au développement économique et à l'amélioration du niveau de vie de ses populations.

 

                                                 La ville d'El Alto

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