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Mes réactions à l'actualité politique intérieure et internationale, sociétale, sociale .... .... Avec légèreté, chaque fois que je le peux ! Je fais mienne la formule de Philippe Meyer (Mammifère omnivore) "Nous vivons une époque moderne !"

Le 5 décembre, comme un air de déjà vu ?

                           Bagdad  2019 ? Non, Paris acte 53 des Gilets Jaunes !

 

Depuis quelques jours, à propos de la journée du 5 décembre prochain, on évoque mai 68 et son vaste mouvement social... qui s'acheva par le défilé sur les Champs-Elysées de la droite gaulliste, puis par la large victoire de cette dernière lors des législatives organisées les 23 et 30 juin 1968. Pour la première fois dans l'histoire de la République, un parti, l'UDR, obtenait la majorité absolue à l'Assemblée Nationale. Ces élections avaient été provoquées par le Président de la République, Charles De Gaulle, qui, le 30 mai 68, avait prononcé la dissolution de la Chambre des Députés.

On fait également le rapprochement avec la grève à la SNCF et à la RATP de l'automne 1995. Le chef du Gouvernement, Alain Juppé, avait alors tenté de porter, dans la fonction publique, le nombre d'annuités de cotisations pour obtenir une retraite à taux plein, de 37,5 à 40. Le mouvement de grève avait démarré le 24 novembre 1995. Après avoir pris une ampleur inconnue depuis 68, il aboutira au retrait du projet de réforme. S'en suivra un sommet social à Matignon le 21 décembre 1995 qui mettra un terme à un mois d'agitation sociale.

A la veille du 5 décembre prochain, peut-on faire un rapprochement avec ces deux mouvements de grande ampleur ?

La situation politique tout d'abord, n'a rien de comparable. En 1967, un an avant les événements de mai, lors des législatives des 5 et 12 mars, la gauche avait frôlé la majorité. Deux ans auparavant, François Mitterand avait, pour la première fois, mis en ballotage le Président sortant, Charles De Gaulle. A l'issue du second tour des législatives de 1967, la majorité n'avait plus qu'une voix d'avance soit 244 élus sur 487. On a vu ce qui se passa quinze mois plus tard...

Alors que le Gouvernement Juppé avait été mis en place par le Président Chirac à compter du 7 novembre 1995, qu'il avait surmonté le mouvement social qui avait pris naissance peu après cette nomination, le 21 avril 1997 le Président de la République prononçait la dissolution de l'Assemblée Nationale. Les législatives qui suivirent constituèrent une grave déconvenue pour le pouvoir en place puisque la gauche en sortit gagnante et Alain Juppé démissionna le 2 juin 1997. Lionel Jospin, premier secrétaire du Parti Socialiste, fut chargé de constituer le gouvernement de cohabitation.

A travers ce rappel, on constate que tant en 1968 qu'en 1995, les forces politiques d'opposition étaient en mesure de proposer une alternance. Deux ans et demi après la présidentielle et les législatives de 2016, à gauche comme à droite, on distingue mal les coalitions politiques qui pourraient, si la situation le nécessitait, présenter une alternative crédible.

Qu'en est-il sur le plan social ?

En mai 1968, la CGT de Georges Seguy fut à la manœuvre.   Si tout démarra le 22 mars 1968 à l'Université de Nanterre, dès le 3 mai la Sorbonne fut occupée par les étudiants. Le 12 mai, la CGT lançait un appel à la grève générale pour le lendemain. Cinq autres syndicats parmi lesquels la CFDT et FO, se joignirent à cet appel. On insistait alors sur la nécessaire solidarité étudiants-ouvriers. La grève du 13 mai se poursuivit jusqu'à paralyser le pays. Elle aboutit à la signature, le 27 mai 68, des accords de Grenelle. Les syndicats obtinrent des avancées considérables comme l'activité syndicale dans l'entreprise, une augmentation du SMIG de 35 %. Après le Front Populaire de 1936 et la Libération du pays en 1945, il s'agissait des plus grandes conquêtes sociales.

Il en fut de même lors du mouvement social de l'automne 1995. Dès le mois d'octobre, le pays connut une grève massive dans la fonction publique et les services publics. Après l'annonce, le 15 novembre, du Plan Juppé sur les retraites et la sécurité sociale, de puissantes manifestations furent organisées notamment par la CGT et FO. Le 12 décembre, deux millions de manifestants se retrouvèrent dans les rues. La puissance de ce mouvement aboutit au retrait de la réforme sur les retraites. Au cours des ces journées de grève on comptabilisa 5 millions de journées perdues. Les syndicats avaient gagné leur bras de fer avec le pouvoir.

Qu'en est-il aujourd'hui ?

La CGT de Philippe Martinez a cédé à la réformiste CFDT , lors des élections professionnelles, la première place. La centrale dirigée par Martinez est par ailleurs minée par d'importantes divisions.

Le mouvement des « gilets jaunes » est né en marge du monde syndical. En obtenant, notamment par la violence, 17 milliards d'euros, ce mouvement a tout au long de cette année, repoussé la « convergence des luttes » à laquelle l'invitait une CGT en perte de vitesse. L'occupation du pavé et des ronds-points avait été infiniment plus payante que les mots d'ordre et les défilés syndicaux.

Dans le secteur de la santé qui connait de fortes revendications rassemblant l'aide soignante et le professeur de médecine, ce ne sont pas les syndicats traditionnels qui mènent un mouvement né au sein de l'hopital et en particulier chez les urgentistes.

Pour cette journée du 5 décembre prochain, un appel à la « grève illimitée » à été tout d'abord lancé à la RATP.

La CGT, FO, l'UNSA ont rejoint cet appel. La « convergence des luttes » appelée de leurs vœux par certains responsables syndicaux permettra-t-elle à leurs troupes de défiler aux côtés des « gilets jaunes » ? Le secteur privé rejoindra-t-il cette mobilisation ? Ces interrogations sont, parmi d'autres, dans l'esprit de nombre de responsables politiques et syndicaux.

Un premier élément de réponse : En 2018, les cheminots, vent debout contre la réforme ferroviaire, avaient pendant trois mois, décrété un mouvement de grève de 2 jours sur 5. Résultat, ils ne purent empêcher la réforme d'aboutir. Ce fut un échec pour les syndicats à l'initiative de la protestation.

La « clause du grand-père » qui, si elle est mise en œuvre, renverra la réforme des retraites aux seuls nouveaux entrants, aura-t-elle l'effet démobilisateur souhaité par le gouvernement ? De même, les mesures annoncées par le Premier Ministre en faveur du secteur hospitalier parviendront-elles à créer une brêche dans l'unité recherchée par les protestataires ?

Bien malin celui qui, à ce jour, pourrait avoir des certitudes sur cette journée du 5 mais surtout, sur les jours qui suivront. La « coagulation » paraît à l'heure actuelle être acceptée par les « gilets jaunes » qui ont tiré les conséquences de la faible mobilisation du samedi 17 novembre, acte 53 de la contestation (28 000 manifestants dans toute la France). Serait-ce suffisant pour une nouvelle mobilisation inscrite dans la durée alors même qu'il n'y a pas unanimité sur cette alliance d'un nouveau genre ?

« Prenez vos désirs pour des réalités ». Le mot d'ordre de mai 68 fut partagé à l'époque très au-delà de la jeunesse étudiante qui ouvrit la voie (et donna de la voix !).

Cinquante et un ans après, il n'est pas certain que le personnel hospitalier, les cheminots, les conducteurs de bus de la RATP, les étudiants de la Sorbonne ou de Nanterre, à la veille du passage du père Noël, brûlent d'envie de rechercher « sous les pavés la plage » !

 

                          Hong Kong 2019 ?  Non, Paris acte 53 des Gilets Jaunes !

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